Eric 🇧🇪🥾🚆🚊🌼🐑🐞📷<p><b>#20jours20souvenirs - 23 décembre 1985 - Le jour où je fus «arrêté» par la police des chemins de fer</b></p><p><strong><strong>Un pari avec mes coreligionnaires</strong></strong></p><p><br>En juillet 1985, j'avais en seize jours parcouru par loin de 8000 kilomètres en train en Belgique et comme à l'époque, il n'y avait pas de smartphones et encore moins d'application de traçage des déplacements impossible de prouver objectivement ces kilomètres parcourus surtout avec des titres de transport du type libre-parcours.</p><p><span><span><b><i>Exemples de titres de transports des années 1980 dont le fameux B-Tourrail</i></b></span></span></p><p>Mes coreligionnaires en classe ne me croyaient pas, soit! En décembre je comptais remettre ça pendant cinq jours et j'avais fait le pari de parcourir au moins 2500 kilomètres sur ces cinq jours.<br></p><p><strong><strong>Comment prouver les kilomètres parcourus sans technologie?</strong></strong></p><p><br>En fait, c'était assez simple comme on le verra sur la copie de la feuille de route de l'époque :</p><ul><li>préparer ses trajets avec l'indicateur officiel des chemins de fer qu'on pouvait acheter en gare;</li><li>laisser un espace pour que le chef-garde puisse apposer la marque de sa pince de contrôle;</li><li>et prévoir des cases pour y faire apposer dans la plupart des gares un cachet à date.</li></ul><p>Pourquoi tout ça me direz-vous? La raison est que le B-Tourrail que j'utilisais pour voyager était une sorte de carte d'abonnement touristique où l'on choisissait 5 ou 8 jours de voyage dans une période de 16. Il fallait noircir la case du jour et le personnel de contrôle apposait la marque de sa pince une fois. Je pouvais prendre dix trains sur la journée, il n'y aurait pas, à l'une ou l'autre exception, une autre marque de pince.</p><p>Bref, rien de bien compliqué et rien de répréhensible à mes yeux.<br></p><p><strong><strong>Où les choses ont dérapé entre Dinant et Namur</strong></strong></p><p><br><span><span><b><i>]La feuille de la discorde! Feuille de route de la journée du 23 décembre 1985</i></b></span></span></p><p>C'est le deuxième jour et jusqu'ici la plupart des gardes ou chef-gardes, parfois un peu surpris de la demande (j'expliquais chaque fois pourquoi je demandais une preuve de ma présence dans le train) et le personnel des guichets apposaient le "précieux" sésame sans trop de problèmes.</p><p>Me voici dans le train IC Dinant - Namur composé d'une locomotive diesel série 52 ou 54 avec des voitures K, je suis confortablement installé dans un siège moelleux de première classe (j'aimais déjà un certain confort et c'était ma contribution à sauver le rail - ce qu'on imagine pas à quinze ans!) et voici qu'arrive le chef-garde qui s'avère, comme je l'appris plus tard, être un chef-garde contrôleur qui étaient reconnaissables à leurs trois "lattes" (en fait trois fines bandes de cordon doré sur le képi). L'encre de leur pince était verte à l'époque et cette troisième latte, on l'obtenait après un bon nombre d'années de service et un examen; c'était le grade ultime pour le personnel opérant dans les trains. Après ce grade, on devenait éventuellement chef de dépôt... Tout ça a disparu de nos jours... Tout le monde est sur un pied d'égalité (théorique), c'est le diplôme qui désigne le grade.</p><p>Bref, voici, le bonhomme qui arrive et me demande mon titre de transport et déjà, dans son regard, je vois qu'il me regarde avec méfiance; c'est sûr, un adolescent en première classe, ça doit sûrement être un fraudeur (ou un fils/fille de cheminot mais ce n'était pas mon cas). Je lui présente mon B-Tourrail parfaitement en règle et demande en expliquant les tenants et aboutissants une preuve de mon passage dans le train... par l'apposition de la marque de sa pince sur ma feuille de route.</p><p>Voilà que le gaillard (pas bien grand ni épais d'ailleurs) monte sur ces grands chevaux, me demande comment il se fait que je connaisse le type de matériel qui assurait les différents trains, ce à quoi je répondis que toutes ces données étaient disponibles dans les revues spécialisées et même des brochures de la SNCB. Vint ensuite la question de savoir comment je connaissais les horaires... là, j'exhibai mon indicateur officiel édité par la SNCB et enfin, la question suprême : "pour quelle puissance travaillez-vous?" (sic!) Me voilà transformé en James Bond...</p><p>Plus sérieusement, je tombe des nues, je lui explique que j'ai quinze ans et suis passionné par les chemins de fer et qu'il s'agit juste d'un pari avec mes copains de classe mais rien n'y fait, il s'entête, et reviens à la charge après chaque arrêt jusqu'au moment où il confisque carrément et mon titre de transport et mes feuilles de route non sans avoir demandé au sous-chef de gare de Lustin, d'appeler la police à l'arrivée à Namur (j'avais entendu par la fenêtre qui n'était pas très isolée dans ces vieilles voitures datant des années 1930). Je suis un peu paniqué : ce type a mon titre de transport, refuse de me le rendre malgré mes demandes. Il se met en tort car il n'a absolument pas le droit de me le confisquer vu qu'il est parfaitement en règle tout comme il refuse de me rendre mes feuilles de route et de me dire ce qu'il me reproche en fin de compte...</p><p>Entre nous, il a eu beaucoup de chance que je sois quelqu'un de calme et pondéré car son attitude méprisante et grossière aurait pu mener à une escalade avec quelqu'un d'autre... et devant son mutisme, je n'ai d'autre choix que d'attendre Namur et de voir ce qu'il va se passer... J'espère seulement que la police ne va pas me garder à Namur, obligeant mes parents à venir me chercher... (J'avais plus peur de cette éventualité car mes parents ne sont pas un modèle de compréhension et de bienveillance... que de la police en elle-même, m'estimant parfaitement dans mon droit et n'ayant rien commis de répréhensible).</p><p>Nous arrivons donc à Namur à 14 h 46 sur une des voies de la gare latérale qui existait à l'époque de part et d'autre du bâtiment et effectivement, un officier de la police des chemins de fer est là dans le froid humide de ce jour de décembre 1985.</p><p>Ce dernier demande au chef-garde contrôleur ce qu'il se passe et voilà que le gaillard explique que je suis probablement un espion (sic!) qui collecte des informations sur la SNCB et demande des marques de pinces sans doute pour fabriquer une fausse pince de contrôle... J'ai trouvé mon maître en matière d'imagination! J'écoute de plus en plus effaré... et de plus en plus inquiet... Enfin, il remet mes feuilles et mon titre de transport et s'en va.</p><p>Un train venant de Bruxelles va arriver et le policier doit se rendre sur le quai car il y a un bris de vitre. Il me propose de l'accompagner pour discuter du "problème". Ai-je le choix? De toute façon, j'ai raté ma correspondance pour Charleroi et doit attendre au moins une demi-heure le suivant... Je lui explique le pari fait avec et pourquoi je demande les cachets et marques de pinces... Nous arrivons à la voie où il doit intervenir, prend quelque chose dans une poche et me le tend : c'est un agenda de la SNCB que tous les cheminots recevaient à l'époque à l'occasion de la nouvelle année et me rend mon titre de transport et mes feuilles et s'excuse pour l'imbécile (sic!) qui lui a fait perdre son temps et le mien... et me souhaite bonne continuation!</p><p>Rassuré et réconforté que je n'avais rien fait de répréhensible, je repars pour la fin de mon périple du jour soulagé et continue à demander mes cachets sur ma feuille de route (comme on peut le voir).</p><p>Malgré que tout s'était bien terminé, je ne comptais pas en rester là... J'avais été traité de manière inappropriée par quelqu'un qui représente l'autorité, visiblement victime de paranoïa... et je me rendis le lendemain à l'agence commerciale de la SNCB à Liège pour tirer tout ça au clair. J'expliquai ce qui s'était passé. A cette époque, le service clientèle, c'était une notion qui n'était pas entendue comme aujourd'hui... Néanmoins, les employés de l'agence s'excusèrent pour le désagrément subi et promirent de faire remonter l'information. Pour eux non plus, il n'y avait rien de répréhensible à demander la marque d'une pince sur une feuille de route. L'argument de fabriquer une fausse pince leur apparaissait tout aussi fantaisiste et même, si j'avais eu un billet ordinaire, il aurait été poinçonné... du pareil au même! C'est là que j'appris que le chef-garde faisait partie de cette "élite" qui était crainte des voyageurs car c'étaient les agents qui effectuaient des contrôles poussés dans les trains et contrôlaient même le travail des gardes et chef-gardes... Bref, on m'invita à regarder si le képi avait une (garde) ou deux (chef-garde) lattes et d'éviter de demander à ceux qui en auraient eu trois (chef-garde-contrôleur)...</p><p>Le reste des cinq jours se sont déroulés sans encombre et même mieux, j'ai rencontré un chef-garde qui était le père d'un autre que j'avais croisé le premier jour de voyage et qui lui avait raconté mon pari. Il m'expliqua même à quoi correspondait les différents chiffres sur la marque apposée sur les tickets (à l'époque, c'était un peu différent d'aujourd'hui d'ailleurs).<br></p><p><strong><strong>Un pari gagné</strong></strong></p><p><br>Bien évidemment, et malgré ce petit incident, j'ai gagné mon pari puisque sur cinq jours, j'avais parcouru pas moins de 2700 kilomètres à travers la Belgique et avais approfondi mes connaissances sur le matériel roulant, et la SNCB.</p><p>Cette mésaventure aurait pu me dégoûter des trains mais il n'en fut rien, il me faut plus qu'un type légèrement paranoïaque pour ça! :wink:</p><p><a href="https://friends.gayfr.social/search?tag=20souvenirs20jours" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener noreferrer" target="_blank">#<span>20souvenirs20jours</span></a> <a href="https://friends.gayfr.social/search?tag=20jours20souvenirs" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener noreferrer" target="_blank">#<span>20jours20souvenirs</span></a> <a href="https://friends.gayfr.social/search?tag=1jour1archive" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener noreferrer" target="_blank">#<span>1jour1archive</span></a> <a href="https://friends.gayfr.social/search?tag=1jour1souvenir" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener noreferrer" target="_blank">#<span>1jour1souvenir</span></a> <a href="https://friends.gayfr.social/search?tag=souvenirs" class="mention hashtag" rel="nofollow noopener noreferrer" target="_blank">#<span>souvenirs</span></a></p>